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Géochimie, changements climatiques et... Révolution française: mieux comprendre les volcans avec Sarah Aufrère

22/04/24

Par Laurence Gagnon

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Sarah Aufrère lors d'une sortie terrain au Mont Meager EN COLOMBIE-BRITANNIQUE

Pour souligner le jour de la Terre, nous souhaitions mettre en valeur le portrait d’une étudiante qui se spécialise en sciences de la Terre. Nous vous présentons aujourd’hui Sarah Aufrère, doctorante en volcanologie à la Faculté de Science, département des Sciences de la Terre à SFU et gagnante de la finale de l’Ouest du concours Ma thèse en 180 secondes 2024.

Originaire de Nice en France, Sarah Aufrère est passionnée par les sciences et douée pour ces matières dès l’école secondaire. Elle débute des études en géologie « pour le fun » et découvre un intérêt grandissant pour les volcans.

« Parmi toutes les autres sciences, c’est vraiment ça qui me fascine. Mais est-ce que je pourrais en faire un métier ? » Ces questionnements la mènent en Guadeloupe dans les Caraïbes pour un stage d’un mois : « Être dans l’observatoire, voir ce volcan qui peut être une menace pour la population, faire des prélèvements, parler aux médias… j’ai trouvé ça vraiment incroyable ». Ce stage confirme alors que Sarah est dans la bonne voie et lui donne l’opportunité de faire un stage à SFU l’année suivante avec Glyn Williams-Jones - Professeur, Directeur de département, Co-directeur du Centre for Natural Hazards Research -  pour l’étude du volcan Tseax : « c’est un volcan qui est entré en éruption il y a 250 ans, donc il y a encore des histoires qui sont transmises chez les peuples autochtones (…) pour moi c’était vraiment une autre approche de la volcanologie, j’ai adoré l’intersection entre les sciences et la culture autochtone ».

lors d'un stage EN Guadeloupe*
SUR UNE COULÉE DE LAVE DU VOLCAN TSEAX En C.-B.*
sur une coulée de lave DU volcan Tseax EN C.-B.*

Après sa maitrise en Angleterre, elle reprend contacte avec Glyn Williams-Jones qui deviendra son superviseur de thèse. « J’ai vraiment beaucoup aimé la Colombie-Britannique et Glyn est vraiment incroyable et on a une belle connexion, ce qui est très important lorsqu’on fait un doctorat ».

Sarah est maintenant à sa quatrième année à la Faculté de Science de SFU. Elle a travaillé sur trois projets de géochimie autour du Mont Meager dans la ceinture volcanique de Garibaldi. Elle s’intéresse principalement aux signes précurseurs qui pourraient indiquer une potentielle éruption.

Lorsque Sarah a commencé son doctorat, la pandémie l’empêchait d’aller faire des prélèvements directement au Mont Meager. Elle a donc pu utiliser les échantillons d’un ancien étudiant de UBC pour faire ses propres analyses : « Je prends les roches de basalte, je les écrase dans une machine et ça fait de petits morceaux. Le basalte c’est très dur à casser (…), moi je cherche des cristaux qui font moins d’un millimètre, donc je dois utiliser un marteau pour en faire une poudre ». Après une série de manipulation pour extraire et regrouper des cristaux d’olivines, Sarah les examine au microscope pour comprendre leurs compositions chimiques qui témoignent de l’histoire du volcan. Elle entre ensuite dans la phase d’analyse des données des différents échantillons pour tenter de mieux comprendre les comportements du Mont Meager. Sa dernière éruption remonte à il y a 2400 ans : « Ça paraît loin, mais à l’échelle géologique ce n’est vraiment pas grand-chose et cette éruption était comparable à celle du mont Sainte-Hélène en 1980 ».

Les fumerolles du Mont Meager, photo prise par GLYN WILLIAMS-JONES
lors de son stage en Guadeloupe*
Cristaux d'olivines et régle en millimètres*

Qu’en est-il de l’impact des changements climatiques sur les volcans et les risques d’éruption ? Sarah nous dit que les volcans qui sont surmontés d’un glacier pourraient être plus vulnérables aux changements climatiques si ces glaciers venaient à fondre : « ça retire un gros poids sur les volcans, ce qui peut déclencher une éruption puisque le magma qui était coincé peut tout d’un coup remonter ».

Mais les éruptions volcaniques peuvent aussi avoir l’effet inverse sur les changements climatiques, elle nous donne un exemple bien ancré dans sa culture française : « Avant la Révolution française de 1789, il y a eu une grande éruption (…), il y avait des cendres dans l’atmosphère qui couvraient presque toute la planète ». Cet épais nuage de cendres à empêcher les rayons du soleil de réchauffer la terre « du coup la terre s’est refroidie, donc plus de culture, donc la famine… ce qui a contribué à la Révolution ! »

Mais n’ayez crainte, les risques que nous soyons témoins d’une éruption volcanique dans les prochaines décennies sont faibles… mais pas nuls : « il y a des éruptions qu’on ne peut pas prévoir. On sait que toute la côte ouest-canadienne est située sur une zone où il y a des volcans, le problème le plus important c’est que les gens ne savent pas qu’il y a des volcans dans les parages, et c’est possible qu’il y ait des éruptions ». Elle nous rassure et nous dit que « le gouvernement commence à mettre en place des mesures de surveillance des volcans, donc avec un peu de chance s’il y avait une éruption qui se préparait, on pourrait l’anticiper. »

L’intérêt de Sarah pour la vulgarisation scientifique l’a menée à participer à la finale de l’Ouest du concours Ma thèse en 180 secondes qui se déroulait le 28 mars dernier. Elle y a présenté sa thèse « Les olivines, des capsules temporelles nous renseignant sur l’histoire pré-éruptive des basaltes du Complexe Volcanique du Mont Meager en Colombie-Britannique » et a remporté la première place. Elle aura l’opportunité de représenter SFU lors de la finale nationale qui se déroulera le 15 mai prochain à l’Université d’Ottawa. On lui souhaite bonne chance !

Mont Meager, Colombie-britannique
 

Photos, gracieuseté de Sarah Aufrère